Peut-on dissocier les corps des territoires ?

Publié par CPIE CENTRE CORSE A RINASCITA, le 13 juin 2025   83

Ce jeudi 12 juin 2025 s'est tenue à la Casa di scenze de Bastia la première journée de sensibilisation à l'impact environnemental sur les santés reproductive et sexuelle. Cette action, coorganisée par le pôle CSTI du CPIE Centre-Corse A Rinascita et la C3S (Corse Stratégie Santé Sexuelle) avait pour interrogation primaire : peut-on dissocier les corps des territoires ? Elle s'inscrit dans le projet Sciences & Santé* de la CSTI.

La journée a été riche en questionnements et en débats. Le matin, quatre intervenants ont exposé un aspect spécifique de cette problématique complexe. Angelina Benedetti a introduit l'échange en discutant de la baisse de la natalité qu'elle a remarquée dans le cadre de sa profession d'infirmière sexologue.

Le CPIE a suivi en exposant les conséquences des dérèglements climatiques et en ouvrant sur les problèmes sanitaires qui en émergent. Après un temps d'échange qui a visé à discuter d'une éventuelle corrélation entre les deux thématiques, le public et les intervenants ont émis plusieurs hypothèses :

  • Les bouleversements climatiques auraient un véritable impact sur la natalité, notamment via l'émergence de la climatophobie ou simplement la baisse de libido liée aux hausses de température, mais la natalité serait également impactée par de nombreux autres facteurs tels qu'une réponse naturelle à la surpopulation, les conflits géopolitiques ou les difficultés économiques.
  • Il revient aux gouvernements de prendre de vraies mesures contre les dérèglements climatiques afin de veiller à limiter l'impact des grandes entreprises et des citoyens sur l'écosystème, mais également à eux de mettre davantage de lumière sur l'influence de la situation climatique sur les santés reproductive et sexuelle, aujourd'hui invisibilisée.

Se sont ensuivies les interventions de Jean-Luc Savelli, directeur de Qualitair Corse, sur les polluants atmosphériques et Marie Martini, sage femme à la Collectivité de Corse, sur les pathologies de la reproduction liées aux perturbateurs endocriniens. Les propositions et hypothèses résultant du temps d'échange suivant ont été :

Il y a un manque de transparence sur l'influence de certains produits du quotidien sur ces aspects, aussi faudrait-il renforcer les nouvelles mises en garde sur les étiquettes et les emballages. De plus, il devient urgent de s'éloigner de l'obsession du plastique, car toute dégradation de ces matériaux entraîne la sécrétion de substances dangereuses pour l'environnement et la santé, notamment reproductive.

Les changements de mentalité sur le respect de l'environnement sont passés largement par l'éducation et des efforts conséquents ont été fournis dans les écoles, collèges et lycées. Toutefois, il faudrait désormais approfondir certains aspects, notamment sur les composés volatils émis à l'intérieur d'un habitat par les peintures, les colles et les meubles en kit. Il faudrait faire de l'éducation environnementale une nouvelle priorité.

  • Il subsiste un tabou de la société, des médias et des gouvernements sur la santé reproductive. Ces retards expliqueraient, en partie, le niveau d'ignorance du grand public sur l'impact anthropique sur la santé environnementale et reproductive.

 L'après-midi, le public et les intervenants se sont réunis en petits groupes afin de débattre sur des questionnements plus spécifiques et parler de leurs expériences afin d'illustrer le propos avec des exemples concrets.

En plus de la validation des hypothèses émises précédemment et la concrétisation des observations scientifiques, des sujets plus intimes ont été abordés : "avez-vous peur pour l'avenir ?", "la situation climatique vous conduit-elle à vous interroger sur votre envie d'enfanter ?", "que faire pour se prémunir des eaux de plus en plus polluées par les traces de médicaments et les déchets industriels ?", "que pensez-vous de la hausse de la population ?" ou encore, entre autres exemples, "selon vous, la situation climatique peut-elle s'apaiser et comment ?".

Il ressort de cette journée d'échanges que ces questionnements reviennent souvent dans l'esprit du public, mais plus particulièrement des dernières générations. Les jeunes comprennent l'impact entropique sur l'environnement et la santé et ne savent pas comment y répondre. Davantage que de l'inquiétude, un sentiment de désespoir les habite à ce propos. Que faire pour commencer, lentement, à redresser la barre ? Les réponses, selon la majorité : les pays doivent faire davantage, les grands pollueurs doivent être légalement forcés à diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre, il faut renforcer la transparence à tous les niveaux et éduquer, toujours plus tôt, à l'impact de l'espèce humaine sur ce qui ne nous appartient pas.

D'autres actions de ce genre seront menées par le CPIE A Rinascita dans le cadre du projet CSTI Sciences & Santé*. La prochaine en date : le Critic'trail de Corte, une course urbaine durant laquelle les participants devront allier effort physique et réflexion pour venir à bout des a priori concernant l'alimentation liée au sport.

Retrouvez les actions de la C3S sur https://www.instagram.com/c3s_corsica/ et du CPIE sur https://www.instagram.com/cpie_arinascita/.

*[Les problématiques sanitaires sont un sujet préoccupant, d’autant plus depuis ces dernières années. Parmi les multitudes de pathologies que l’on ne soigne pas encore, certaines avancées scientifiques sont passées sous silence par méconnaissance, manque de visibilité ou d’une médiation efficace, quand d’autres sont traitées massivement par les médias sans citer de sources fiables. L’objectif du projet Sciences & Santé est de mettre en réseau les acteurs de la culture scientifique dans les sphères de la santé à travers diverses rencontres et actions en vue d’apporter une réflexion, avec un nouveau recul, sur des problématiques sanitaires peu ou mal abordées.]